Guy Kastler est un paysan retraité du Sud de la France, ancien producteur de vin et de fromage de brebis. Syndicaliste, un des initiateur du réseau « semences paysannes » et faucheur volontaire, il suit encore aujourd’hui les dossiers semences et OGM pour la confédération paysanne française. Nous avons rencontré ce passionné pour en apprendre plus sur les « nouveaux OGM ».

Cet article est parsemé d’extraits sonores, issus de l’entretien avec Guy, qui vont plus loin que le texte.

Définition

Les nouveaux OGM sont des organismes modifiés par de nouvelles techniques de mutagenèse, qui provoquent une mutation à un endroit précis du génome. Aujourd’hui, l’industrie agroalimentaire fait du lobbying pour que seuls les « vieux » OGM, issus de la transgenèse, soient considérés comme tels. Cette technique est plus ancienne et consiste à prélever un gène dans un organisme pour l’insérer dans un autre.

Enjeux juridiques et financiers

Aujourd’hui, l’industrie agro-alimentaire fait du lobbying pour que la réglementation européenne des OGM en matière de traçabilité ne s’applique pas aux nouveaux OGM. Cela leur permettrait notamment de ne pas devoir étiqueter les produits issus de cette technique comme des OGM et de les vendre plus facilement aux consommateur.trices.

Selon Guy, l’enjeux financier central de la commercialisation des nouveaux OGM est le dépôt de brevet. En cas de dérèglementation, les semenciers qui créent et commercialisent les OGM (comme Bayer ou Syngenta) ne seraient pas obligés d’indiquer la technique qui permet de les différencier des semences paysannes. Et comme, juridiquement, la portée d’un brevet sur une information génétique s’étend à tout organisme qui contient et exprime cette information génétique, les grosses multinationales pourraient finir par percevoir des royalties sur l’ensemble des semences existantes.

Écoutez Guy expliquer un exemple de dérives des brevets :

Les nouveaux OGM, fausse solution pour l’agriculture ?

Pour Guy, oui : « S’adapter au réchauffement climatique, au manque d’eau, c’est des promesses qu’ils ont déjà faites dans les années 90 avec les plantes transgéniques et qu’ils n’ont jamais réalisées. 90 % des plantes transgéniques sont des plantes pesticides, c’est-à-dire qu’elles tolèrent un herbicide ou qu’elles produisent un insecticide. Ils n’ont pas fait des plantes qui s’adaptent au changement climatique. Ils ne feront pas mieux avec les nouveaux. Il n’y a pas un gène qui permet de s’adapter à la sécheresse. C’est l’ensemble de la plante et son adaptation à l’endroit où elle est cultivée qui fait sa résilience. L’alternative est simple. La sélection paysanne se fait dans le champ où la plante sera cultivée pour qu’elle soit le mieux adaptée possible au climat, au sol, aux pratiques agricoles de l’endroit où on est. De plus, les paysans sélectionnent des plantes très diversifiées. Même à l’intérieur d’une même variété, il y a une diversité très importante. Dans l’industrie, c’est l’inverse, toutes les plantes sont identiques. S’il y a un problème, toute la récolte, tout le champ est perdu. »

Un combat perdu d’avance ?

Les organisations paysannes, environnementales et citoyennes ne se résignent pas ! Elles se coordonnent pour lancer des campagnes en direction du grand public, faire du plaidoyer auprès des élus ou intenter des procès en justice. Les faucheurs volontaires ont également recours à la désobéissance civile depuis de nombreuses années.

Écoutez Guy raconter la victoire des « faucheurs volontaires »

Exemples de mobilisation :

Sous la pression de l’agrobuisness, la commission européenne a fait une proposition de loi pour exempter les nouveaux OGM de la règlementation en vigueur. La coordination européenne des organisations paysannes de La Via Campesina et des organisations de la société civile (dont Autre Terre) ont publié une lettre ouverte qui demande au gouvernement, aux parlementaires et à la commission européenne de suspendre toute discussion sur la révision de la réglementation des OGM tant que la cours de justice de l’union européenne, qui doit garantir le respect du principe de précaution, ne s’est pas prononcée sur le sujet.

Une pétition européenne pour garder les nouveaux OGM agricoles dans la législation sur les OGM existe également. Vous pouvez la signer sur le site internet de Nature et Progrès. Vous y trouverez également de nombreuses informations supplémentaires si vous êtes intéressé.e. par la thématique !


Photo de couverture Autre Terre magazine 13

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